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Des mesures de sauvegarde agricole, énième et vaine tentative de faire passer l'accord commercial UE-Mercosur

29-10-25

Non, Monsieur Macron, l’accord commercial UE-Mercosur ne va pas « dans le bon sens ». Pas plus qu'il y a quelques mois, quand vous vous y opposiez encore.

44 organisations de la société civile interpellent Emmanuel Macron suite à son revirement sur l'accord commercial UE-Mercosur. Et comment expliquer ce revirement ? Il est basé sur des « mesures de sauvegarde agricole » introduites par la Commission européenne pour faire céder la France... et les agriculteurs. Ces mesures, énième tentative de sauver l’accord de libre-échange de plus en plus contesté, ont fait l’objet d’une analyse juridique par le cabinet d’avocats Baldon, à la demande de CAN Europe.

 

Un accord qui ne tient pas la route face aux enjeux agricoles et climatiques

Le verdict est implacable. Ces mécanismes ne sont rien d’autre qu’une tentative de faire taire le monde agricole et de faire céder la France, dans un contexte où le seul argument qui circule encore dans les couloirs des institutions européennes pour justifier l'accord est d'ordre géopolitique. De plus en plus de voix s’élèvent pour dire que sur le fond, cet accord ne tient pas la route face aux enjeux agricoles ou climatiques actuels.

L’avis juridique analyse si le chapitre sur les sauvegardes bilatérales contenu dans l'accord commercial intérimaire (« ITA ») offrirait une protection suffisante aux secteurs agricoles de l'UE les plus vulnérables à l'augmentation des importations de produits du Mercosur. Il pointe que, non seulement, il sera très difficile de démontrer avec succès que les mesures de sauvegarde agricoles sont justifiées en cas de litige, car le mécanisme mis en place est très exigeant et ne répond pas aux enjeux du monde agricole. Mais il met aussi en évidence que seule la manière dont l'UE entend utiliser son droit d'appliquer des mesures de sauvegarde est définie. Ces mesures pourraient donc ne pas être considérées comme légales au regard de l'accord commercial, surtout du point de vue des pays du Mercosur!  Les mesures de sauvegarde sont, de plus, de nature temporaire et ne peuvent être appliquées que pendant une période transitoire de 12 ans. Une protection partielle et réactive donc, plutôt que préventive.

L’avis complet peut être consulté ici.

Soit Monsieur Macron n’a pas lu la nouvelle clause de sauvegarde, et a fortiori, il n’en a pas fait l’analyse ; soit il l'attendait, de connivence avec la Commission européenne, pour rejoindre le camp du "oui" et "donner un os à ronger" à nos agriculteurs. Une chose est sûre, c’est que c'est l'UE tout entière qui va tomber sur un os en attisant la légitime colère agricole.

La Belgique reste quant à elle incroyablement silencieuse, et singulièrement le Gouvernement wallon, qui vient de rejeter les demandes des écologistes que la Belgique demande l'avis de la Cour européenne de justice et qui devrait exprimer son inquiétude de voir la Commission européenne essayer de sauver désespérément l'accord en ajoutant des mesures qui ne tiendront pas la route pour les agriculteurs.

 

Des partenariats plus stratégiques, équitables et durables

La cacophonie de ces derniers jours de la part des principaux dirigeants européens (voire les déclarations contradictoires de Kaja Kallas et Antonio Costa) est révélatrice d'une profonde crise de légitimité : les effets négatifs avérés du libre-échange font l’objet d’un rejet croissant par l’opinion publique et la société civile européenne, rejointes par le monde agricole. L'accord UE-Mercosur symbolise sans doute à lui seul tout ce qui cristallise ce rejet. 

Il est temps que l’UE se dote d’une nouvelle boussole commerciale basée sur des partenariats plus stratégiques, équitables et durables. Nous devons avoir le courage de protéger l’agriculture, l’économie et le commerce européens, une approche locale et circulaire, afin de rendre l'UE plus juste, plus résiliente, plus robuste, moins dépendante de régimes autoritaires.

 

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