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Accord UE-Mercosur : un accord de commerce n’est pas la solution pour retisser des liens

17-04-24

Malgré les annonces bruyantes de certains chefs d'Etat de suspension des négociations sur l'accord de libre-échange UE-Mercosur, les négociations se poursuivent. Face au risque qu'elles reprennent de plus belle après le scrutin du 9 juin prochain, nous proposons avec le groupe Verts/ALE du Parlement européen des scénarios alternatifs pour renforcer notre relation avec les pays du Mercosur sans pour autant conclure un accord commercial qui serait destructeur du climat, de l'environnement, de l'agriculture, et des droits des travailleurs.

 

Il y a presque cinq ans jour pour jour, le 30 juin 2019, la Commission européenne annonçait la conclusion des négociations politiques entre l’UE et les quatre pays du Mercosur. Ce faisant, la Commission qui arrivait au bout de son mandat prenait de court tout le monde, y compris les eurodéputés fraîchement élus qui n’avaient pas encore siégé. 

Depuis lors, la mobilisation de la société civile et d’eurodéputés progressistes, à la tête de laquelle se trouvent les Verts, ainsi que les oppositions plus ou moins franches de plusieurs capitales ont permis d’éviter le passage à la ratification.

Cette intense activité n’implique pas que nous rejetons tout renforcement des liens avec les pays du Mercosur. Il est indubitable que nous partageons une culture, une histoire et des valeurs communes (même si elles sont bafouées par certains gouvernements) et que nous avons besoin les uns des autres dans un monde multipolaire.

Cependant, nous défendons l’idée que ce n’est pas par le biais d’un accord de commerce qui profitera aux grandes entreprises de l’automobile, des services financiers, de l’agrobusiness, des produits chimiques, ainsi que de leurs actionnaires que l’on pourra œuvrer ensemble à la réalisation des Objectifs pour le Développement Durable auxquels les 27 et les pays du Mercosur ont souscrit, ou même à l’Accord de Paris ou aux normes fondamentales de l’OIT, pour ne citer que quelques références internationales qui nous lient tous ensemble.

 

 

Nos propositions alternatives pour renforcer les liens avec les pays du Mercosur

Conformément à la démarche inclusive que nous promouvons dans tous nos dossiers, avec ma collègue Anna Cavazzini avec qui je pilote la campagne « Stop Mercosur » et avec le soutien du Groupe des Verts, nous avons commandé une étude à un consortium d’experts. Celui-ci réunit le Fair Trade Advocacy Office (FTAO, commerce équitable), l’Institut Veblen, l’Institut Européen pour la Politique Environnementale Européenne, E3G et le Centre pour le Droit International du Développement Durable (CISDL).

Ils ont élaboré quatre scénarios au degré d’ambition variable et dégagé des recommandations, certaines transversales, d’autres spécifiques à chaque scénario, prévoyant différentes modalités de coopération et d’aides financières. Malgré les variations entre eux, tous visent à soutenir la transition écologique et social dans les deux partenaires et à répondre aux nombreuses préoccupations exprimées par les populations indigènes, les travailleurs, les agriculteurs, les entreprises oeuvrant à la transition. Les scénarios sont les suivants :

1.      Faute de mieux : renégociation de l’accord et balisage par des clauses garantissant sa durabilité

2.      L’idéal : La durabilité et les Objectifs de Développement Durable avant tout (neutralisant des conséquences éventuellement négatives pour les pays du Mercosur des mesures prises dans le cadre du Pacte Vert et Social européen, soutien réciproque à la transition des deux partenaires)

3.      Coopération et intégration ciblées avec accès limités aux marchés et intégration (en s’inspirant notamment d’un accord existant avec le Costa Rica, les Fidji, l’Islande, la Nouvelle Zélande et la Norvège) 

4.      Partenariats stratégique bilatéraux (autour notamment sur les matières premières) incluant les populations locales, prévoyant des transferts technologiques, la coopération sur l’économie circulaire et la création de valeur ajoutée dans les pays d’extraction.

 

 

Etude complète (en anglais)

 

Les éléments essentiels (en français) :

 

Bien sûr, cette étude n’est pas la fin de l’histoire, car un certain nombre de sujets n’ont pas pu être abordés pour différentes raisons. C’est ainsi que, ultérieurement, l’étude pourra être complétée de propositions portant sur la question du numérique (des rapports de la CNUCED ont montré que les pays latino-américains et l’UE ainsi que l’Afrique avaient tout à gagner d’une alliance pour éviter le duopole chino-américain). On pourrait également concevoir un projet conjoint autour de la finance verte et de l’investissement responsable, voire des microcrédits et des monnaies complémentaires, ou encore autour des exigences en matières d’écoconception et des normes de production.

Il ne faudra pas non plus oublier la dimension culturelle que nous partageons en grande partie. L’esprit de ces coopérations ne sera pas d’imposer un modèle européen, des solutions européennes aux pays du Mercosur, mais de travailler ensemble dans l’intérêt collectif et en pensant aux générations futures.

 

 

 

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