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L’UE va enfin sévir contre le travail forcé

16-10-23

Le Parlement européen a adopté ce lundi sa position sur le règlement interdisant les produits issus du travail forcé. Le texte aura des conséquences bien concrètes pour les 28 millions de travailleur.euses forcé.es à travers le monde. Près de 4 millions d'entre eux sont astreints à du travail forcé imposé par un Etat (pensons à la Chine avec les Ouïghours par exemple).

C’est une victoire dans un dossier sur lequel nous nous sommes battus avec le groupe Verts/ALE du Parlement européen : la législation européenne contre le travail forcé a été adoptée par le Parlement européen. Nous avions dû batailler ferme avec la société civile et d'autres eurodéputés pour obtenir de la Commission européenne qu'elle dépose cette proposition législative.

L’idée même d’agir contre ce fléau ne faisait pas l’unanimité dans l’hémicycle. La droite conservatrice et libérale du Parlement a d’abord essayé de décrédibiliser la démarche, puis de différer les travaux (en demandant une nouvelle étude d’impact qui aurait postposé d’une bonne année les travaux), et enfin d'affaiblir la législation durant les négociations jusqu'à la dernière minute du vote final! Ces eurodéputés voient essentiellement cette législation comme un frein aux activités des entreprises ou un coût pour celles qui auraient recours au travail forcé. 

Ils ont ainsi réussi à obtenir qu’en 2027, les effets de la législation soient examinés au regard des critères de « coût-bénéfice » du travail forcé et de l’impact sur la compétitivité des entreprises. Le travail forcé est pourtant une violation de la Déclaration universelle des droits humains de 1948 ! En ce qui nous concerne, nous chercherons à profiter de cette évaluation et possible révision de la directive pour en élargir la portée, en couvrant notamment le transport maritime de ces produits.

De sérieuses avancées

Malgré cela, et dans l'ensemble, les amendements sont une victoire pour les Verts.à améliorer la proposition initiale de la Commission sur divers points.

1. Nous sommes parvenus, durant les négociations, à éviter le pire: l’exclusion des PME du champ d’application du règlement, pourtant cheval de bataille de la droite tout au long des négociations. Les PME composent 99% de l’industrie de la mode, secteur bien connu pour être régulièrement pointé du doigt pour des faits de travail forcé

2.Dans les cas où, après enquête, il serait avéré que le travail forcé résulte d'une oppression étatique, il appartiendra à l’entreprise dont les produits sont concernés de démontrer qu'elles n'y ont pas eu recours. Cela vise à empêcher certaines entreprises de tenter de bénéficier de coûts très réduits grâce au recours à des travailleurs forcés, au XinJiang par exemple.

3. Une condition préalable à la levée de l'interdiction de la mise sur le marché européen des produits teintés de travail forcé tiendra dans la démonstration par l’entreprise concernée que les travailleurs et victimes ont été correctement dédommagés.

4. Les partenaires sociaux, comme les syndicats, pourront contribuer à l'ensemble du processus, depuis la phase d'enquête préliminaire jusqu'aux activités de la nouvelle plateforme de coopération entre les autorités compétentes.

5. Au-delà de la lutte contre le travail forcé qui n'est en soi qu'un symptôme d'un grave dysfonctionnement des marchés, un amendement prévoit la mise en place d'une coopération internationale pour s'attaquer aux causes fondamentales du travail forcé.

6. J'ai essayé que la législation couvre les « pires formes de travail des enfants » (70 millions d'enfants) mais cela n'a pas été possible. Cependant, lorsque la Commission évaluera les effets du règlement, elle devra s'intéresser à la manière dont le travail forcé impacte particulièrement les femmes et les jeunes. Ceci pourrait l'amener à prendre de nouvelles dispositions.

La suite du processus

Une fois que le Conseil représentant les ministres nationaux aura fixé sa position, ce qui pourrait être chose faite avant la fin de l'année, les discussions entre le Conseil et les négociateurs du Parlement, dont je fais partie en qualité de rapportrice fictive pour les Verts, débuteront de manière à ce que la règlement puisse s'appliquer dès l'année 2026. 

 

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