
La Commission européenne a présenté ce mercredi 14 septembre 2022 sa proposition de législation contre le travail forcé. Le texte est loin d’être satisfaisant.
La proposition de la Commission européenne contre le travail forcé était attendue. Elle répond à une forte attente du Parlement européen, et est publiée dans la foulée du rapport Bachelet du 31 août dernier, qui atteste de nombreuses violations de droits humains contre la minorité ouïghoure en Chine, et demande au gouvernement chinois d’ouvrir une enquête sur les allégations de travail forcé dans les camps de prisonniers.
La proposition de la Commission européenne n’est malheureusement pas à la hauteur de nos attentes. L’outil proposé sera insuffisant pour lutter efficacement contre le travail forcé. Contrairement à nos demandes, le nouvel instrument ne consistera pas en système bloquant d’emblée aux frontières européennes les marchandises soupçonnées d’avoir fait intervenir du travail forcé, à l’instar de ce que font les États-Unis afin de bannir les produits issus de régions ou pays spécifiques (156 produits venant de 77 pays sont concernés). Il s’agira d’un mécanisme de retrait des produits dont on disposerait de suffisamment de preuves pour soupçonner que des travailleurs forcés sont intervenus. Les États membres sont chargés d’instaurer une autorité de contrôle, laissant la porte ouverte à 27 systèmes différents. Les plaintes devront émaner d’entreprises ou de la société civile et donneront lieu à une enquête. Le système devra prévoir des sanctions ‘efficaces, proportionnées et dissuasives’. Ce dernier point est positifs un point positif, mais il aurait été préférable que la Commission fixe elle-même des standards.
La @EU_Commission présentait aujourd’hui sa stratégie de lutte contre le travail forcé. Elle était attendue: nous ne pouvons accepter de trouver dans nos magasins des produits ayant eu recours à des travailleurs forcés #droitshumains pic.twitter.com/hjFoPs6yKQ
— Saskia Bricmont 🇪🇺 (@saskiabricmont) September 14, 2022
Je regrette aussi que la Commission dise ne pas vouloir d’une interdiction d’entrée sur le territoire UE au nom des règles de l’OMC. Le système instauré aux États-Unis se révèle pourtant conforme à ces règles, et est plus efficace.
Mes attentes étaient également importantes en matière de lutte contre le travail des enfants. Les services responsables de la Commission estiment que 3,3 millions d’enfants forcés de travailler seront protégés par ce texte. Or, selon l’OIT, ce sont 79 millions d’enfants qui travaillent dans les pires conditions assimilées à du travail forcé!
Il appartient désormais aux colégislateurs, Parlement européen et Conseil, de se positionner sur cet instrument. Au Parlement européen, j’interviendrai au sein de la commission du commerce international afin de renforcer le texte et sa portée, afin de répondre à cet enjeu essentiel pour assurer le respect des droits humains.