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Réforme tumultueuse du mécanisme d’accès au marché européen pour les pays à faibles revenus

06-05-22

La commission du commerce international vient d’adopter le rapport de ma collègue verte finlandaise, Heidi Hautala, sur le « système de préférences généralisées », de son petit nom le « GSP ». Ce mécanisme donne accès au marché européen aux produits issus des pays à faibles revenus sans que ceux-ci doivent s’affranchir de taxes douanières. Il existe depuis de nombreuses années et est régulièrement actualisé.


Le GSP repose sur trois piliers pour distinguer les pays partenaires selon leur niveau de développement et leur capacité à s’engager à respecter et mettre en œuvre une trentaine de textes internationaux. Il s’agit notamment de texte ceux interdisant la torture, favorisant l’égalité de rémunérations entre les femmes et les hommes, garantissant les droits économiques, sociaux et culturels ou encore le respect de la biodiversité.


Le texte qui a fait l’objet de 440 amendements a été âprement négocié. Je ne vais pas rentrer dans les détails de ce texte complexe mais voudrais souligner les points suivants:


- Le règlement contient une série de mesures de sauvegarde. Celles-ci permettent de limiter les importations de produits dits «sensibles» si le volume des importations est tel que des emplois et producteurs en Europe seraient sérieusement menacés.
Je ne peux que remarquer que les groupes PPE et Renew (droite conservatrice et libérale, qui nous dépeignent caricaturalement comme des «anti-commerce») ont fait le forcing pour que le riz et le sucre soient reconnus comme produits protégés. Autrement dit, l’UE pourra bloquer l’arrivée sur nos marchés des productions des pays à faibles revenus. L’envoi de tels produits est pourtant important pour générer des recettes et soutenir le développement de ces pays.
C’est la deuxième fois en quelques mois (après un précédent vote sur la taxe carbone CBAM -qu’ils ont sabordée parce qu’ils voulaient doublement protéger les industries les plus émettrices en CO2) que le PPE révèle son visage protectionniste dont pourtant, il nous affuble. Le chef de file des libéraux, celui-là même qui pousse pour une ratification rapide de l’accord UE-Mercosur voulait même élargir le champ des produits européens protégés aux secteurs de la chaussure et du cuir !

- Ensuite, dans sa proposition législative, la Commission prévoyait que les pays qui ne prendraient pas des mesures pour réadmettre les réfugiés arrivés en Europe pourraient être exclus du système. Nous, Verts, considérions que c’était une forme de prise d’otage : il n’est pas acceptable de lier une politique de développement à la lutte contre les migrations. Heureusement, un compromis put être trouvé pour renvoyer ce point dans un considérant tout en en neutralisant la dangerosité en le liant aux droits humains, aux objectifs du développement durable, etc. On s’attend sur ce point à un intense bras de fer avec les Etats membres réunis au Conseil. Ils soutiennent l’approche de la Commission et vont certainement tout faire pour le réintroduire.

- Un des points nouveaux tient dans le fait que les préférences octroyées aux pays bénéficiaires peuvent leur être retirées s’ils exportent des biens issus du travail des enfants. (Les cas de travail forcé pouvaient déjà donner lieu à un retrait.)Évidemment, la lutte contre le travail des enfants doit être une priorité dans l’agenda international ! Vous savez d’ailleurs à quel point je suis engagée dans ce combat. Mais, ne nous aveuglons pas avec de belles paroles, car aucun pays ne peut éradiquer du jour au lendemain ce fléau. Surtout lorsqu’il n’existe pas d’alternatives au travail des enfants comme des salaires décents pour leurs parents, un système éducatif gratuit ou une sécurité sociale ! 

Alors, je suis heureuse que ma proposition ait été retenue : avant de pénaliser les pays où des enfants travaillent, la Commission devra regarder si ces pays ont adopté, avec l’aide de l’Organisation internationale du travail, des stratégies cohérentes et réalistes pour venir à bout de ce phénomène ; l’UE évaluera régulièrement les progrès et apportera une assistance technique et financière.


La suite des discussions


Maintenant que le Parlement européen a arrêté sa position sur ce texte important, la prochaine étape consistera à entrer en négociation avec le Conseil (dès lors que les ministres auront trouvé un accord entre eux) pour faire advenir ce texte avant que le GSP actuel mis en place en 2012 expire à la fin de l’année prochaine.

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