
Après des mois de tergiversations, les États membres de l'Union européenne se sont enfin mis d'accord sur des objectifs climatiques en vue de la COP30 Climat au Brésil. Alors que les négociations internationales sur le climat vont démarrer d'un jour à l'autre, la Belgique, tout comme la Hongrie, ont essayé d'affaiblir la position européenne. L'accord trouvé n'est ni catastrophique, ni une avancée. Je vous explique.
Des mois de blocage
Le 18 septembre dernier a eu lieu un Conseil des Ministres de l'Environnement. Ceux-ci devaient se mettre d'accord sur les objectifs européens pour 2035 et 2040 en matière climatique. Le 23 et 24 octobre s'est, ensuite, déroulé un sommet des chefs d'État et de gouvernement pour discuter, entre autres, du climat. À l'issu de ces réunions, aucune décision finale n'a été prise.
N'ayant pas adopté un engagement européen clair pour 2040 et uniquement une fourchette pour 2035, l'Union européenne (UE) a raté la date limite pour la soumission des contributions déterminées au niveau national en matière de climat (CDN) à l'ONU. Ces CDN sont importants car ils donnent le ton avant la COP30. Pour rappel, c'est l'UE qui soumet son plan climatique à l'ONU au nom de l'Union et de ses États membres. Il est profondément embarrassant que l'UE, autrefois leader mondial en matière de climat, ne soit même pas capable de tenir ses propres engagements dans les délais impartis. Ce retard a entamé la crédibilité de l'UE et sa capacité à jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre l'urgence climatique.
Après ces interminables retards, le Conseil a franchi la ligne d'arrivée à la toute dernière minute avant la conférence sur le climat. Ce 5 novembre, les ministres se sont enfin mis d'accord.
Open Letter by scientists to the Council: "Climate Neutrality Is Europe’s Greatest Economic Opportunity”. Ahead of the European Council meeting on 23.10.2025, 2,178 scientists urge EU Heads of States & Governments to take ambitious decisions for the 2040 targets. zenodo.org/records/1739...
— Guy Pe'er (@guypeer.bsky.social) October 20, 2025 at 6:23 PM
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Que contient cet accord ?
L'objectif de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre de 90% en 2040, par rapport à 1990, est conservé. Conserver nos engagements devrait être la moindre de choses, mais, au vu du climato-scepticisme ambiant, c'est une bonne nouvelle. La Belgique s'est d'ailleurs opposée, tout comme la Hongrie, au maintien de cet objectif.
Dans l'ensemble, l'accord est en deçà des attentes, il manque d'ambition, de clarté et d'engagement en faveur de la protection du climat.
Je déplore, par exemple, les flexibilités introduites par cet accord. Les États membres pourront utiliser des crédits carbones internationaux à hauteur de 5%, ce qui correspond à une cible domestique de réduction de 85% (sur le territoire de l’UE). Concrètement, ces 5% représentent un transfert de la protection du climat et des investissements d'environ 100 milliards d'euros vers des pays hors UE. Les États membres pourront financer des projets de décarbonation à l'international pour compenser une partie de leurs émissions. Cet argent fera défaut pour les investissements nécessaires au sein de l'UE dans la décarbonisation de notre industrie et dans la réduction des coûts énergétiques pour les citoyens. Il est utile de rappeler que le Conseil consultatif scientifique européen sur le changement climatique avait appelé à une réduction des émissions de 95 % d'ici 2040, en prenant en compte la baisse des émissions au niveau national, et pas des réductions externalisées hors de l'UE. Les Etats membres ont donc choisi la voie contraire à celle préconisée par les scientifiques.
Cet accord sur la cible 2040 a permis de débloquer celui sur les CDN de l’UE pour 2035 qui sera présentée à la COP30. Il était temps ! Cependant, l’objectif 2035 n'est pas une cible unique mais une fourchette de réduction de gaz à effet de serre (un objectif de réduction des émissions compris entre 66,25 % et 72,5 %). L'absence de consensus sur un chiffre concret envoie un signal fatal à la veille de la conférence sur le climat.